Singeries et… hommerie

Pour qu’un grand musée national s’associe à deux créateurs de bande dessinée, il fallait au départ un évènement extraordinaire, mieux mis en valeur dans des cases que dans des cages. Et la transformation inattendue d’un homme en grand singe est justement ce type d’évènement, qui défie la science et rend les chercheurs perplexes.

L’album Singeries est le fruit d’une étroite collaboration entre le Muséum national d’histoire naturelle et les éditions Casterman. Les auteurs Denis Petit et Humphrey Vidal ont imaginé une histoire fantastique aux échos kafkaïens. Franky Stein est un intellectuel dépressif qui cherche à se suicider et constate avec étonnement qu’il a des airs simiesques ! Il est devenu un animal pensant, friand de littérature dont il dévore avidement (et littéralement) des centaines de pages et bondissant un peu partout !

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©Casterman 2012. Photo : Olivier Lagueux.

Cette BD met en scène Paris et plus spécifiquement le zoo de Vincennes et le Jardin des Plantes. On y retrouvera avec plaisir la Grande galerie, devenue Galerie de l’Évolution. On y reconnaîtra la scénographie audacieuse imaginée par René Allio pour sa réouverture, en 1994. Un cortège d’animaux naturalisés que le héros remarque à peine.

Franky Stein fascine une équipe de chercheurs du Muséum intrigués par son érudition et ses bonnes manières. Doit-on le considérer comme un singe ? Ou plutôt comme un homme ? Pourrait-il même être plus évolué qu’eux ? Et comment expliquer son état, sa transformation subite ? Il fascine aussi le grand public et devient une vedette des médias. Mais surtout, il dérange des groupes nébuleux agissant dans l’ombre et cherchant à contrôler l’enseignement des sciences et à redonner à la religion une place prépondérante. Curieusement, c’est le primate qui semble avoir ici le plus d’humanité et de compassion. La plupart des humains qu’il croise semblent plutôt cruels, manipulateurs ou ambitieux.

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©Casterman 2012. Photo : Olivier Lagueux.

La BD est prétexte à une réflexion sur les attaques religieuses contre l’évolution, sur la dichotomie homme/animal, sur les manipulations génétiques et l’eugénisme. Si ces intentions sont louables, il faut dire que le récit en souffre. Le fil narratif est souvent confus et l’histoire ne réussit pas à captiver autant qu’elle le devrait. Il y a certes des trahisons, des meurtres, des poursuites, mais malgré tout cela, le lecteur reste sur sa faim.

Peut-être aurait-il fallu, tout comme M. Stein, dévorer cet album à pleine dents pour mieux en apprécier l’originalité…

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